mercredi 29 juillet 2009

Saint Lazare, Julio Prestes, en voiture pour la Nostalgie !


(Photo provisoire: le dessin de la Gare de Júlio Prestes vue de l'intérieur sera bientôt scannée et mise en ligne, substituant celle-ci)


(juillet 2009) - C’est une lune percée de nombreux cratères, posée au milieu d’une énorme verrière constituée de carrés grisâtres sur fond de nuit s’écrasant peu à peu sur la ville alentour. L’on tourne le dos et l’on se laisse entraîner par la perspective impressionnante de cette coque renversée, posée sur quantité de piliers en métal : une gare. Mais une gare où ne viennent échouer que peu de trains, un toutes les 20 minutes, en provenance d’une inextricable et banlieue sans grand intérêt. La gare s’appelle Júlio Prestes, en plein cœur de São Paulo, construite il y a 80 ans, juste à côté de la Gare de la Luz, bien plus fréquentée, elle, dont les faisceaux de voie passent juste à côté, de sorte que regardant la lune - en fait, une horloge ! (dont les cratères ne sont autres que douze chiffres) - l’on aperçoit des rames de six wagons aller et venir, dont les phares tantôt jaunes, tantôt rouges perforent l’obscurité qui s’instaure.


De telles scènes ferroviaires, que j’apprécie au plus haut point, m’ont enchanté, un soir d’hiver à São Paulo, alors que je revenais, en train, d’Alphaville. J’ai revécu des émotions bien parisiennes. Quand je flânais à la frontière des 8ème et 17 arrondissements, dont les stations de métro portent des noms évocateurs tels Liège et Rome, je m’arrangeais toujours pour aller traîner sur les ponts enjambant les voies jaillissant de la gare Saint Lazare. Et je me régalais de ces trains de banlieue qui n’arrêtent pas de se croiser, dans un concert de grincements d’essieux tandis que les haut-parleurs de la gare toute proche égrènent des informations et des noms de villes.Entre Saint Lazare et Júlio Prestes : quelque dix-mille kilomètres. Mais une étonnante proximité, car j’ai retrouvé, à São Paulo, la même atmosphère, la même émotion face à ces trains qui se fondent dans la nuit, emportant à bord des centaines de destinées incertaines. Certes, à Paris, les rames de la RATP et de la SNCF sont bien plus modernes et confortables, et elles comportent deux niveaux (deux étages), tandis qu’à São Paulo, celles de la CPTM, une sorte de RATP locale, sont plutôt obsolètes, d’un aspect plus lourd et d’un autre âge puisque les passagers doivent se presser sur un seul niveau. Mais au fond, ce sont les mêmes vibrations ferroviaires, les mêmes fragments de paysages, les mêmes grincements d’essieux et les mêmes claquements de portes s’ouvrant puis se refermant. Un moment, même, j’ai eu l’impression d’avoir fait un retour précipité à Paris, par le chemin de fer.


Je n’ai pu m’empêcher de retourner, quelques jours plus tard, à la gare Júlio Prestes, pour y faire un dessin de cette immense verrière, avec l’horloge tout au milieu, qui m’a d’abord fait penser à une lune mais qui soudain m’a donné l’impression d’une araignée dont les aiguilles auraient tissé tout autour les quadrilatères de fer enserrant des centaines de carreaux vitrés. "Saudade", une fois de plus, de «ma» gare Saint-Lazare où, un an et demi plus tôt, j’avais fait un dessin assez semblable, par un froid tout aussi tranchant, assis sur un quai (alors qu’à Júlio Prestes je suis allé m’assoir, confortablement, sur une passerelle surplombant les voies à l’intérieur même de la gare). Sortant de la gare Júlio Prestes, j’ai admiré, comme souvent, sa façade striée de colonnes cannelées, dont l’envergure rappelle vraiment la gare Saint Lazare et tout autant celle de la gare de Lyon puisqu’elle brandit, fort haut dans le ciel, un beffroi lui aussi pourvu d’horloges.

Splendide architecture ferroviaire, à la fois majestueuse et élégante. De ce point de vue-là, Paris et São Paulo ont bien des points communs.


Y. Le H.

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